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Télétravail et bureau post-covid : quelle nouvelle donne ?

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La crise sanitaire nous a obligé à repenser nos modes de fonctionnement. Le télétravail en est peut-être un des principaux. Et si ce n’était pas un phénomène si nouveau ? Michel Lallemant, sociologue français du quotidien d’idées AOC en fait l’analyse d’un point de vue historique.

Les trois révolutions du télétravail

Le télétravail est l’une des conséquences les plus visibles et les plus discutées de la crise sanitaire. En quelques mois à peine, il a perturbé les habitudes d’une grande partie de la population française. Plusieurs enquêtes ont alors été menées afin de prendre la mesure d’une telle rupture, mais aucune de ces investigations n’a encore fait le choix de l’analyser selon une perspective historique. Pourtant, avec le recul, le télétravail s’inscrit dans une continuité. Il est bien, plus qu’une simple modalité d’ajustement conjoncturel, l’épicentre de trois révolutions.

Directement imputable à la pandémie mondiale, l’explosion du télétravail a perturbé en quelques mois à peine les habitudes d’une grande partie de la population française. Depuis le début du grand renfermement, plusieurs enquêtes ont été menées afin de prendre la mesure d’une telle rupture. Préoccupées avant tout, on le comprend, par les effets immédiats d’une délocalisation du travail jusqu’au domicile des salarié·e·s, aucune de ces investigations n’a encore fait le choix du recul historique.

Afin d’évaluer la portée de la soudaine reconfiguration dont le coronavirus a été le prétexte, il est pourtant intéressant de pousser d’un cran l’horizon de la réflexion. En procédant de la sorte, le télétravail apparaît comme bien plus qu’une simple modalité d’ajustement conjoncturel : il est l’épicentre de trois révolutions de natures différentes.

La première est purement quantitative. Avant la crise sanitaire, une minorité d’actifs et d’actives (entre 2 % et 17 % selon les études et les définitions retenues) œuvrait, à temps plein ou non, à distance de son lieu professionnel de rattachement. Une enquête menée par l’Institut national des études démographiques (Ined) entre le 30 avril et le 4 mai 2020 rapporte que, sept semaines après l’entrée en confinement, 41 % des travailleurs encore en activité œuvraient à domicile. Le bond effectué est à la fois compréhensible et malgré tout quelque peu inattendu.

Compréhensible en raison d’une situation sanitaire qui exigeait des mesures rapides pour limiter les risques de contamination dont les espaces professionnels sont des vecteurs privilégiés. Les incitations du ministère du Travail ainsi que, quinze ans après la précédente, la signature d’un nouvel accord national paritaire sur le sujet (26 novembre 2020) ont probablement stimulé et légitimé le recours à une forme d’organisation grandement boudée jusque-là.

Le travail à distance a, en effet, longtemps peiné à séduire. C’est pourquoi son succès récent mérite d’être considéré avec au moins une once d’étonnement. Dans sa forme contemporaine, qui lie technologies de la communication et activités effectuées hors de l’entreprise (principalement à domicile, plus marginalement dans un tiers-lieu), le télétravail va bientôt fêter ses soixante ans. La légende veut que le coup d’envoi ait été donné en 1962 par une société anglaise (la F. International Ltd) qui aurait été la première à employer des programmeurs sur leurs lieux d’habitation.

Que sait-on de ce télétravail qui a brusquement crû en importance depuis la crise sanitaire ?

Avec le succès croissant de l’informatique, les scénarios futuristes n’ont cessé ensuite de prédire le retour du travail à domicile. En 1965, la commission des transports de la baie de San Francisco estimait que, en quelques années à peine, plus d’un salarié sur cinq pourrait travailler chez lui. The Third Wave (1980), un essai du futurologue américain Alvin Toffler, anticipait pareillement une vaste décentralisation du système productif. De fait, outre-Atlantique, les pratiques n’ont jamais été à la hauteur de ces projections. En France, en dépit d’intérêts prononcés par les pouvoirs publics au début des années 1980 afin de recomposer l’aménagement du territoire, le télétravail n’a pas davantage fait florès. Du moins jusqu’à récemment.

Que sait-on justement de ce télétravail qui a brusquement crû en importance depuis la crise sanitaire ? Et pourquoi peut-on évoquer à ce sujet une deuxième révolution ? En répondant à la première de ces questions, certaines études ont pris à défaut quelques idées reçues. Fin avril 2020, l’enquête menée par Res publica (en partenariat avec la CFDT, Terra nova, Metis Europe, Liaisons sociales magazine et Management et RSE) concluait ainsi, contre toute attente, qu’en situation de travail à distance, les relations entre les responsables de proximité et leurs équipes avaient gagné en confiance et en qualité. Au fil des semaines cependant, comme le confirme en particulier l’expérience du deuxième confinement, la dynamique collaborative a rapidement perdu de son allant.

Le plus important néanmoins est que la plupart des enquêtes aboutissent à des conclusions qui, en réalité, ne surprennent guère. Côté positif, les personnes interrogées affirment en général que travailler chez elles est synonyme d’économie de transport, de plus grande flexibilité dans l’organisation de son emploi du temps, de gain en autonomie… voire, dans certains cas, de concentration et d’efficacité accrues.

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